Consolider les fondations en priorité

Le secteur de la fabrication doit faire face à des perturbations en matière de main-d’œuvre, comme des pénuries de travailleurs, des difficultés sur la chaîne d’approvisionnement, des exigences en matière de durabilité et des dynamiques de marché en évolution. À quel stade de l’automatisation les fabricants en sont-ils, et quels sont les principaux défis en matière d’automatisation et de numérisation ?

Nous avons demandé à Peter Buenk, architecte d’entreprise chez HSO, son avis sur le sujet.

Q : Lorsque vous vous penchez sur l’automatisation et la numérisation des entreprises dans le secteur de la fabrication, quelles sont les principales difficultés rencontrées par les sociétés ?

R : L’un des plus gros défis pour les entreprises de fabrication vient du fait que celles-ci ont toujours eu tendance à créer elles-mêmes différents types d’applications, sur site, au fil des années, et selon leurs préférences. Ces systèmes soutiennent leur manière de travailler mais en matière de transition vers le cloud, ils nécessitent un changement considérable. Quelle que soit la direction, le besoin de standardisation est extrêmement urgent. En effet, nos clients sont loin de disposer de multiples équipes de développement capables de suivre la cadence en matière de transformation numérique. Les processus de standardisation visant à renforcer l’automatisation représentent un énorme défi dans lequel les personnes jouent un rôle crucial. Celle-ci aura en effet un énorme impact sur leur travail quotidien.

Q : Une autre question doit être envisagée avant tout le reste. Ces entreprises doivent changer, mais pour quelle raison exactement ?

R : J’appelle cela le piège de l’héritage : en tant que société, vous avez énormément bâti par vous-même, vous profitez d’un filet de sécurité composé d’applications locales et sur mesure. Au niveau micro, ce système peut convenir, mais à plus haut niveau, cela entrave l’innovation et le changement. Vous devez souvent dire non aux clients, aux équipes ou aux fournisseurs car les produits sont obsolètes, ils ne sont plus en service ou des personnes ont quitté l’entreprise… Toutes ces raisons rendent le changement difficile. Mais le besoin de changement s’accentue en raison de la mondialisation, de l’augmentation des règlementations et de nouvelles exigences des clients. Vous ne pouvez plus vous permettre d’attendre plus longtemps, d’autant qu’il devient de plus en plus difficile de sortir de ce « piège ». Plus vous attendez, plus le risque augmente de vous faire rattraper par la concurrence.

Q : Quels sont les autres moteurs de changement que vous pouvez observer ?

R : L’un des moteurs d’un environnement informatique plus adaptable repose sur le fait que nos clients des sociétés de fabrication ne souhaitent plus investir autant à l’avance, mais plutôt acheter un service ou un abonnement. Pour être capable d’assurer la « servitisation », vous devez vous moderniser car les anciens systèmes relationnels et financiers ne sont souvent plus en mesure de prendre en charge cet aspect.

Un autre moteur de changement vient du fait que les clients attendent une approche et un service personnalisés. Vous ne pouvez plus produire pour un marché générique. La personnalisation nécessite également différents systèmes.

Les anciens systèmes et processus entravent l’automatisation, la vitesse et l’agilité. Les fondations de la transformation numérique et la capacité à changer font défaut à bon nombre de sociétés. Traditionnellement, les entreprises de fabrication ont tendance à tout faire le plus efficacement possible. Mais avec une telle focalisation sur la gestion des coûts, les optimisations nécessitant des investissements en vue de générer des bénéfices ont souvent été négligées par le passé. Chez nos clients, nous pouvons observer un historique de réparations ponctuelles plutôt qu’une résolution des problèmes fondamentaux du système.

Q: Qu’entendez-vous exactement par "fondations de la transformation numérique" ?

R : Ces fondations ont plusieurs composantes. Tout d’abord, la capacité à changer, la volonté et la compréhension. Vous devez comprendre ce qui est nécessaire, puis identifier ce que cela implique pour l’entreprise, et enfin le mettre en œuvre. Cela correspond plus ou moins à l’aspect immatériel. Deuxièmement, sur le plan concret et matériel, vous avez besoin d’une plateforme dédiée aux données et aux intégrations. C’est vraiment la base de tout processus de modernisation et d’automatisation. Nos clients sont très dépendants des intégrations car ils travaillent avec de nombreux systèmes différents. Il est donc essentiel de disposer de données de référence de qualité. Si ces conditions ne sont pas réunies, alors la progression est gelée.

Bien sûr, vous pouvez aussi vous fier à vos machines bardées de capteurs. Vous obtiendrez alors un grand nombre d’informations issues de vos clients, à savoir des données d’utilisation, mais c’est là que commence le véritable travail. Comment faire travailler les données pour vous : connectez les informations à la production, à la chaîne d’approvisionnement, à votre processus de service. Mon conseil est donc de mettre de l’ordre en priorité dans les fondations.